Severance – Saison 2

Il y’a les séries qui se mettent en fond, celles qui sont tellement communes qu’on oublie d’y revenir pour la saison 2, celles qu’on retrouvera avec plaisir mais sans trop d’empressement et il y’a celles où on est au rendez-vous trois ans plus tard, le jour de la diffusion, avec le même enthousiasme que si la saison précédente avait été diffusé il y’a quelques semaines. Dans cette dernière catégorie, en 2025, il n’y a que Severance, jusqu’à preuve du contraire. Lorsqu’on y revient, on a encore en mémoire ce superbe crescendo de huit épisodes qui avait mené à un dernière épisode sous forme de course contre la montre pour les quatre employés du « raffinement des macrodonnées ». Un coup de maître. Cette saison 2 démarre avec un faux départ en ouvrant le monde à ce Conseil qu’on ne voyait pas et en dévoilant le « nouveau management » de M. Milchick. Puis une certaine routine s’installe. Les mêmes motifs défilent indéfiniment. Il faudra attendre l’épisode 4 pour que la série se remette à étonner, à bouleverser son audience dans un twist, certes un peu éventé, mais amené comme un choc. On se souvient alors qu’on regarde Severance. Malheureusement, cela n’arrive pas si souvent lors de cette saison 2. Certes une très bonne saison qui fourmille de scènes pittorresques, mais pas une saison exceptionnelle.

Le schéma de la saison 1 était une progression dans un espace-temps limité centré sur la double identité de Mark Scout. Ses zones d’ombres laissaient autant de hors-champ qui accentuaient notre imagination. Les dix nouveaux épisodes ont pour fil rouge la quête de Gemma, alias Miss Casey, épouse regrettée de Mark. Mais ils s’éparpillent en une multitudes de mosaiques, de la mythologie de Lumon à la vie en double des quatre héros, d’un team building dans un univers simulé à une bourgade abandonnée des Etats-Unis mangée par Lumon. Maintenant que la clé du mystère (des identités externes) a été craquée, il n’y a plus de limites à tout montrer. C’est à ce niveau que cette saison 2 pêche. Elle emprunte un peu toutes les routes et est, de fait, moins incarnée. Le culte de Keer Eagan et le versant très scientologue de Lumon, jusqu’ici un à-côté, est exploré sous toutes ses coutures, ouvrant les portes d’une mythologie de l’absurde qui prend le pas sur le récit. La série cède à l’épisode consacré à l’origine d’un personnage, et plutôt deux fois qu’une. Elle emprunte des terrains convenus : triangles amoureux, péripéties, répétitions, embryons d’idées avortées. Elle le fait toujours avec doigté et sans remplissage, mais tous ces éléments rassemblés rapprochent cette saison 2 d’une série plus normale. Et en dépit d’un final soutenu et plutôt émouvant, il n’y a aucune surprise à se mettre sous la dent au bout du voyage.

Alors faut-il regarder le verre à moitié vide ou à moitié plein ? Nous préférons regarder le verre à moitié plein, car le miroir grinçant que la série tend au monde de l’entreprise est toujours intact. L’humour absurde est toujours aussi savoureux. Les acteurs sont toujours au top. Le paradoxe sans résolution subi par les quatre protagonistes, pour qui la libération de Lumon mènera invariablement à la mort, permet de livrer les meilleurs moments de cette saison. On ne s’attache pas aux outies. On adore les inies. C’est peut-être pour cela que la quête de Gemma restera un à-côté sur toute la saison en dépit des efforts des scénaristes pour braquer les projecteurs sur son calvaire. C’est peut-être pour cela que le parti pris radical de la dernière scène ne choque pas autant qu’il le devrait. Il n’y a pas de résolution parfaite, ni de réintégration miracle à ce que Lumon a créé, juste une acceptation de l’irréversibilité de la situation. Mark S. a gagné son indépendance lorsqu’il décide de revendiquer le peu de temps qu’il lui reste avec Helly R. , quitte à subir la sentence de son outie, qui n’aura plus aucun intérêt à être dissocié. A moins qu’un dialogue puisse finalement se créer entre les deux moitiés, guidé par la reconnaissance de l’un pour l’acte de son double… Une troisième saison est déjà annoncée, et on se demande bien vers où Severance va pouvoir nous mener. Car vraisemblablement, tout a été dit, montré et développé. Plus aucune question n’est en suspens.

Un petit bonus 🙂

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