Homicide Life On the Street – Saison 3

Créateur/Showrunner : Paul Attanasio

Scénaristes : Tom Fontana, Jorge Zamacona, James Yoshimura, Henry Bromell, Julie Martin, Bonnie Mark, D.Keith Mano, Noel Behn, Eugene Lee, David Mills, David Rupel, Rogers Turrentine, Randall Anderson, Jane Smiley

Réalisateurs : Ted Demme, Keith Gordon, John McNaughton, Lee Bonner, Whitney Ransick, Richard Pearce, Peter Medak, Kenneth Fink, Myles Connell, Tim Hunter, Michael Fields, Tim Van Patten, Barry Levinson

Chef Opérateur : Jean de Segonzac

Montage : Cindy Mollo, Jay Rabinowitz, Greg Featherman

Musique : Douglas J. Cuomo, Chris Tergessen

Chef Décorateur : Vince Peranio

Pays : USA

Durée : 20 x 45 mn

Diffusée sur NBC du 14 octobre 1994 au 5 mai 1995. En France sur Série Club à partir du 3 avril 1998. Disponible en dvd zone 2 UK depuis le 26 février 2007 (coffret saison 2)

Production : Tom Fontana, Barry Levinson, Henry Bromell, Jim Finnerty, Gail Mutrux, Julie Martin, James Yoshimura, Debbie Sarjeant, Jorge Zamacona

Acteurs Principaux : Daniel Baldwin, Ned Beatty, Richard Belzer, Andre Braugher, Yaphet Kotto, Melissa Leo, Jon Polito, Kyle Secor, Isabella Hoffman, Zeljko Ivanek, Clayton LeBoeuf, Al Freeman Jr., Steve Buscemi, Gloria Reuben, Tony Lo Bianco, Tony Todd, Bruno Kirby, David Morse, Robert Clohessy, Dean Winters, Lucinda Jenney

Genre : Polar, Drama

Note : 7,5/10

C’est sans promotion que NBC lança la troisième saison d’Homicide, en la déplaçant dans la case du vendredi soir à 22h. Malgré les bons scores de la courte saison 2, les détectives de la criminelle de Baltimore durent laisser la place aux urgentistes du Cook County de Chicago. Ce nouveau créneau, qui serait le sien jusqu’au dernier épisode, accueillait bien moins de spectateurs et il plaçait Homicide face à une série visant le même public (Picket Fences – La ville du Grand Secret,de David E.Kelley, diffusée sur CBS). Mais les américains friands de programmes noirs qui restaient chez eux le vendredi soir pouvaient enquiller les X Files de la Fox et Homicide. On a vu pire comme double programme

7. Emancipation

Pour cette saison 3, NBC commanda treize épisodes, puis passa à vingt une fois la saison démarrée. La série se rapprochait enfin d’une saison complète de network, mais cette promotion ne pouvait se faire qu’en contrepartie d’une standardisation. Toujours à la tête de la chaîne, Warren Littlefield voulait casser le côté routinier de la vie des flics de Baltimore pour y injecter plus de drame et de théâtralité, une émancipation claire de l’ouvrage de David Simon et de la réalité des détectives qui ont inspiré la série. Pour cette saison 3, Barry Levinson et Tom Fontana promurent Henry Bromell comme co-producteur exécutif. C’est lui qui eut l’idée d’éviter les enquêtes multiples pour associer un épisode à un cas, les fameux red balls introduits par l’enquête sur le meurtre d’Adena Watson. Nous voyons plus de ces enquêtes événementielles rassemblant une majorité ou la totalité des enquêteurs, et ce dès l’ouverture de la saison.

Pembleton en pleine crise de foi après les meurtres aux gants blancs

Les trois premiers épisodes voient l’équipe de Giardello épauler celle du lieutenant Megan Russert sur un de ces cas atypiques : Les White Glove Murders perpétrés à chacun des trois épisodes sur une femme catholique dévouée à la communauté, sont commis par une tueuse en série schyzophrène dont l’esprit abrite plusieurs personnalités. On surfe sur la vague montante de la criminologie popularisée par les romans de Thomas Harris (auteur du Silence des Agneaux), à cent lieux des meurtres crapuleux et ordinaires, sans véritable génie, que David Simon décrivait dans Homicide, a year on the killing streets.

Ce ne sont pourtant pas ces ajustements de format des enquêtes qui trahissent le plus l’ADN du show, mais la sur-exposition à la vie privée des enquêteurs. Ponctuant harmonieusement les enquêtes des deux premières saisons, elle devient ici prédominante. Lorsque le lieutenant Megan Russert (un rôle difficile, interprété en nuances par Isabella Hoffmann) rejoint la distribution en début de saison, on a la mauvaise surprise de la retrouver aussitôt dans les bras du détective Beau Felton. Les scénaristes s’étaient bien gardés de sexualiser Kay Howard, ils ne sont visiblement plus dans cet optique. Russert ne reprend le profil d’aucun détective de David Simon et elle tend à fédérer un public plus féminin en abordant frontalement les questions de genre.

La chaîne veut aussi un show plus sexy, en raccord avec le succès de NYPD Blue. Homicide semble subir une poussée d’hormones sur cette saison, qui conduit à des réactions étranges de nos enquêteurs. Tim Bayliss et Meldrick Lewis ne sont pas les mieux lôtis, entre la gênante parenthèse Emma Zoole et d’autres errements peu professionnels qui rendent leurs personnages particulièrement enfantins et peu professionnels. Dans l’épisode Colors, Bayliss brise la glace sans tain de la salle d’interrogatoire sans même une remontrance. Difficile à croire. L’intrigue fleuve et plutôt sympathique de l’achat du Waterfront Bar  par Munch, Bayliss et Lewis s’intègre elle aussi plutôt artificiellement, et n’est pas servie par des diffusions d’épisodes dans le désordre (heureusement corrigées dans les dvd). L’idée d’un lieu de rassemblement hors les murs appartenant aux détectives est pourtant bonne et le Waterfront apportera de beaux moments à la série.

L’enseigne du Waterfront, un bar de Fell’s Point où traînait souvent l’équipe de la série et qui rejoint le casting de cette saison 3 (Photo : John Trumbull)

Beau Felton prend quand à lui plus d’épaisseur sur ses problèmes conjugaux que sur ses enquêtes. Il n’y a que Pembleton, devenu le référent moral des spectateurs, qui monte encore d’un créneau, au point de prendre la main sur toutes les affaires intéressantes. Cette starisation du détective joué par Andre Braugher est brandie sans aucune retenue dans l’épisode à moitié comique qui clôt cette saison 3. Réalisé par Barry Levinson, The Gaz Man où un homme qu’il a envoyé en prison (Bruno Kirby) s’est juré d’humilier le détective.

8-Le Fantôme de Crosetti

Le détective Crosetti, interprété par Jon Polito, était absent du début de la saison, pour cause de départ en vacances, mais il ne revint jamais. L’épisode Crosetti s’ouvre sur la découverte de son corps, noyé. Son coéquipier Lewis fait tout pour que Bolander, primary sur l’affaire, ne conclue pas à un suicide, ce qui reviendrait à lui retirer la garde d’honneur pour son enterrement. Crosetti est un épisode d’un grand tact, et particulièrement puissant sur le fléau des suicides dans la police. Il se conclue par un des finals les plus émouvants de la série : Alors que le cortège des détectives transporte la dépouille dans sa dernière demeure sans aucun honneur, Pembleton – qui avait refusé de se rendre à l’Eglise – se présente en uniforme pour saluer son collègue.

Un beau rattrapage des scénaristes Tom Fontana et James Yoshimura pour un départ dont la chaîne fut à l’origine. NBC aurait décidé d’évincer le personnage car il n’était pas suffisamment attractif pour le public. Il faudra quelques temps pour que le lieutenant Giardello se décide à supprimer le nom de son détective du tableau des Homicide. Il attribuera aux autres inspecteurs les affaires non résolues de Crosetti dans Nothing’s personal, révélant sa propre peur de subir le sort de son détective, lui qui est aussi un homme qui n’a dans sa vie que son boulot de flic. Jugé trop déprimant, l’épisode ne fut diffusé par la chaîne qu’en fin de saison alors qu’il était le neuvième dans l’ordre de production, ce qui provoqua de sérieuses erreurs de continuité. Meldrick Lewis sera condamné à enquêter sans coéquipier fixe sur toute la durée de cette saison 3, brisant l’équilibre sacré des duos construits depuis les débuts de la série.

9-Conserver l’ADN

Le coeur de cette saison 3 se présente comme une suite de ré-ajustements de la formule de départ avec la nouvelle ligne plus drama. Certains épisodes parviendront heureusement à éviter l’écueil du toujours plus, tout en brisant le quotidien, pour proposer des variations intéressantes qui auraient eu leur place dans les deux premières saisons. Centré sur Kay Howard, l’épisode The Last of the Watermen prend des allures d’Arabesque, en suivant la détective en vacances, alors qu’elle se retrouve à aider à enquêter sur un meurtre tragique dans la communauté de pêcheurs où elle a grandi. Atypique dans un cop show et proche des films néo-noir ruraux qui apparaîtraient au début des années 2000, cet épisode reste isolé, mais il s’intègre bien à la série car il transpose les problématiques des bas-fonds de Baltimore à une autre population que celle des ghettos, comme saura le faire la saison 2 de Sur Ecoute avec les dockers quelques années plus tard.

Deux mères de famille dans la tourmente

Every Mother’s Son suit l’enquête de Bayliss et Pembleton sur le meurtre hasardeux d’un adolescent par un autre adolescent. Les deux mères se retrouvent au commissariat et se rapprochent, sans se douter de qui est l’autre. Cet épisode retrouve un peu du désespoir glaçant des deux premières saisons et de la focalisation sur les victimes de l’épisode Bop Gun.

Il est suivi par le très bon Cradle to Grave, qui revient à un format de trois enquêtes. L’enquête principale dans le milieu des Hell’s Angels est originale, mais les deux autres cas – sur un déplacement de corps malvenu et une affaire de dissimulation politique impliquant Pembleton – reprennent fidèlement des éléments du livre de David Simon. L’épisode se conclue sur un montage parallèle sur fond du I’ll Stand by you des Pretenders, alors que le détective Pembleton rend son badge, humilié par la trahison de son supérieur hiérarchique. Probablement un des pics de cette saison.

Howard et Felton face à un cas étrange de disparition de corps

Le choc des points de vue et la perception des couleurs sont au centre de l’épisode Colors qui invite l’acteur David Morse dans le rôle de Jim Bayliss, le cousin du détective Tim Bayliss. Sentant sa famille menacée, l’homme a abattu un jeune étudiant turc ivre qui ne lui voulait aucun mal. L’enquête menée par Frank Pembleton dévoile un racisme latent chez un homme qui représente pourtant le pinacle du rêve américain. La façon dont l’épisode décrit la réception de l’événement par le système judiciaire de l’époque est brillante et déstabilisante, jusqu’à ce qu’un dialogue final brise le charme, car sur-explicatif.

L’ambivalent David Morse dans un rôle taillé sur mesure

L’épisode In Search of Crime Past, écrit par l’écrivaine lauréate du Pullitzer Jane Smiley, est un des trop rares épisodes centré sur Stan Bolander. Il tourne autour de l’exécution d’un homme qui a par la passé été arrêté par le détective. Alors que la fille du condamné prend en otage le colonel Barnfather nouvellement nommé, « Big Man » se retrouve obligé de reprendre l’affaire pour creuser plus loin. Un événement inespéré le pousse à se poser des questions sur ses compétences de flic. Cet épisode sur le doute est d’autant plus efficace qu’il arrive à un moment clé de l’évolution du personnage, qui est passé tout près de la mort.

10-Hémorragie

Le lendemain de l’inauguration du Waterfront bar, Howard, Felton, Bolander et Munch font une descente de routine pour arrêter un pédophile qui serait coupable du meurtre d’un gamin. Ils sont victimes d’une embuscade et les trois premiers sont touchés par balle, entre la vie et la mort. La police de Baltimore est sur le pied de guerre pour retrouver le tireur, qui pourrait être le suspect…ou pas.

Une scène d’intro qui marqua le monde des séries

A l’instar de l’enquête du White Glove Killer du début de la saison, The City that bleeds démarre une trilogie sur un red ball de premier rang. Après le suicide de Crocetti, le risque de perdre trois détectives de la brigade de Giardello pourrait être le coup de trop. Passé une scène d’introduction qui secoue et marque, les scénaristes parviennent à tenir la distance en ménageant rebondissements sur l’enquête, réaction des autres flics et des nouvelles aux compte-goutte des victimes pour maintenir un bon suspens. Pour l’occasion, le détective Mitch Drummond (Tony Lo Bianco), ancien coéquipier de Bolander dont il a beaucoup parlé, rejoint l’équipe d’enquêteurs. La détective Theresa Walker des crimes sexuels, interprétée par Gloria Reuben (qui, comme Julianna Margulies, rejoindra Urgences l’année suivante dans le rôle de Jeanie Boulet) vient aussi combler le trou béant de l’Unité de Giardello. Nous faisons aussi connaissance avec le Lieutenant Jasper de la Brigade d’Intervention d’Urgence, qui est interprété par nul autre que l’homologue de Giardello dans la vie réelle, le lieutenant Gary « Dee » d’Addario, qui quitte son fauteuil de conseiller technique sur la série pour passer devant la caméra. C’est malgré tout Steve Buscemi qui tient le haut de l’affiche. Il ajoutera encore une belle corde à son arc de psychopathes en interprétant Gordon Pratt, l’auteur des coups de feu.

Gordon Pratt, tueur de flics de sang froid

Les audiences sont boostées par ce triptyque, qui bien que marquant, n’est définitivement pas dans l’esprit du livre de David Simon. Si Tom Fontana avoue que franchir le pas de tirer des coups de feu à l’écran après trois ans d’abstinence n’était pas rien, le public semble adopter ce tournant plus théâtral, et même en redemander. Un quatrième épisode Law and Disorder tombe à point pour désamorcer toute la tension. Il met Tim Bayliss seul face à une enquête lié à ce drame, alors que le reste de l’équipe tente de passer à autre chose. L’hémorragie est stoppée. Les trois détectives s’en sont sortis vivants et pourront vite reprendre le service, mais la série a passé un nouveau cap.

The Gaz Man vs. Frank Pembleton…et le disco

Dans l’épisode Colors, Bolander déclare qu’en cette année forte en drames, l’unité de Giardello a été comme poursuivie par une malédiction. On peut difficilement lui donner tort. Ces guérisons miraculeuses n’empêcheront pas les départ de Daniel Baldwin et Ned Beatty à la fin de la saison, mais contrairement à Jon Polito, ces départs furent volontaires. Les acteurs se montrèrent frustrés de tous les compromis faits pour la chaîne, jugeant qu’Homicide avait perdu son intégrité. Malgré tout, Homicide était toujours sur la sellette à la fin de la saison, et l’atypique The Gaz Man fut pensé comme le dernier épisode de la série car les audiences étaient à moitié moins bonnes que celles de la saison 2. NBC prolonge le show in extremis, probablement dans l’espoir qu’il durera assez longtemps pour la syndication (la vente de droits de rediffusions en masse pour les séries ayant atteinte près de 100 épisodes). La saison 4 sera une saison complète de 22 épisodes. Homicide est désormais devenue une vraie série de network, certes au dessus du lot, mais elle a perdu en chemin sa vraisemblance, une partie de son ton et de son identité.  Et les ajustements ne sont pas terminés.

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