Dans la catégorie Midnight Movies du FEFFS 2023, le sympathique Satanic Hispanics nous offre une anthologie de cinq courts réalisés par des réalisateurs venus de tous les coins d’Amérique du Sud. Le fil rouge de l’anthologie, réalisé par Mike Mendez (Serial Killers, Le Couvent) démarre sur la découverte des cadavres d’un groupe de migrants massacrés à El Paso. L’unique survivant se fait appeler le voyageur et il affirme aux deux agents du FBI incrédules qui le passent à la question qu’il est immortel et qu’il est poursuivi par un spectre meurtrier, San La Muerte, prêt à massacrer quiconque se met sur son passage. Pour convaincre les agents qu’ils risquent leur vie s’ils ne le laissent pas partir, le voyageur sort de son chapeau quatre récits sur des créatures surnaturelles qu’il a croisé et qui sont sensées convaincre nos deux Scully en uniforme qu’il faut croire dans le paranormal. Pendant ce temps, le compteur tourne et la menace apparaît de plus en plus imminente. Du moins c’est ce qu’on voudrait nous faire croire, car l’interrogatoire est plus un prétexte à combiner les histoires que le liant véritable d’une anthologie. Le segment « San La Muerte » qui conclue le film fait son petit effet, mais il ne permet pas de transcender les climax des différents sketchs, qui pourraient tout autant exister de façon indépendante dans une série horrifique. Ils ont d’ailleurs des qualités et des tons très différents.
Le premier récit du voyageur, « También Lo Vi », est le meilleur du lot. Réalisé par Demian Rugna (Terrified), qui est aussi coupable de la bombe horrifique de ce FEFFS 2023 dont nous parlons plus en détail dans un autre article, le segment confirme le talent du réalisateur argentin pour rendre effrayante une idée plutôt sommaire sur le papier. Gustavo, un génie adepte du rubix cube, se met à avoir des visions dérangeantes. Il en fait part à sa soeur et à un medium qui déserte illico les lieux. Durant la nuit, ses visions vont prendre vie et révéler qu’il a ouvert un portail vers l’au-delà. Demián Salomón, le frangin de When Evil Lurks, est particulièrement convaincant et la tension monte crescendo dans le malsain. Demián Rugna parvient à nous cueillir via une apparition qui fera sursauter le plus blasé des films d’horreur, et il enfonce le clou avec un couperet brutal.
Le second segment, « El Vampiro » opère un virage à 180 degrés puisqu’on se retrouve dans une comédie horrifique mettant en scène un vampire aguerri qui se met dans de beaux draps. Trop occupé à massacrer des cosplayers le soir d’Halloween, il a oublié le passage à l’heure d’été. S’en suit une série d’aventures qui le freinent dans sa volonté d’échapper au jour, alors qu’un suspens court sur le fait que sa « femme » viendra ou pas le sauver à temps. Sympathique mais peu originale, cette partie signée par le cubain Eduardo Sanchez (un des deux créateurs du Projet Blair Witch!) surfe sur la vague initiée par What we do in the Shadows sans en avoir les ambitions comiques. Elle vaut surtout pour la prestation décalée d’Hemky Madera, qui parvient à injecter du peps à une poignée de scènes de cet After Hours vampirique.
Le troisième segment négocie un virage tout aussi grand puisqu’on se retrouve à cheval entre polar urbain et folk horror. Porté par le mexicain Gigi Saul Guerrero, « Nahuales » suit un vieil informateur du FBI qui se retrouve à payer le prix de son passé. Un peu confuse, cette histoire de châtiment d’esprits anciens possède de belles qualités formelles et une atmosphère travaillée, mais elle pâtit de se retrouver comme un cheveu sur la soupe entre deux histoires qui ne se prennent vraiment pas au sérieux.
La dernière histoire du voyageur suit un américain poursuivi par une malédiction qui a déjà décimé tous ses amis qui l’ont accompagné lors d’un voyage à Cuba. Leur erreur est d’avoir enregistré une mystérieuse cérémonie. Il invite son ex, la dernière survivante de leur groupe, pour la mettre en garde, tout en sachant qu’elle risque d’être à son tour possédé. Son meilleur atout est le marteau de Zanzibar (le titre du segment), une arme surnaturel en forme de pénis géant très efficace, mais dont le récit des origines est…improbable. Il n’y a rien de bien effrayant dans ce segment livré par le cubano-argentin Alejandro Brugués (Juan of the Dead) qui aligne ses possessions sur la série des Evil Dead et qui cumule les scènes grotesques. Mais dans le contexte d’un festival, il se suit avec un certain plaisir. A défaut de convaincre les agents du FBI avec leurs récits ubuesques, nos Masters of Horror latinos auront assuré un bon moment aux spectateurs et prouvé que le fantastique sud-américain a repris des couleurs.
Réalisation : Mike Mendez, Demián Rugna, Eduardo Sánchez, Gigi Saul Guerrero, Alejandro Brugués
Scénario : Pete Barnstrom, Alejandro Mendez, Lino K. Villa
Directeur de la photographie : Luke Bramley, Matthias Schubert
Montage : Mike Mendez, Leandro Vitullo
Musique : Pamela de Alba, Leonardo Escarcega, Gilde Flores, Beto Fortis, Pablo Isola, Blake Matthew, Kyle Newmaster, Herman Nunes, Michael Weber
Cheffe Décoratrice : Daniela Medeiros
Direction Artistique : Laura Aguerrebehere, Daryll Hoss, Rhea Solanki
Production : Alejandro Brugues, Matt Cleckner, Patrick Ewald, Carlo Glorioso, Joe Hui, Robert L. Lucas, Mike Mendez, Johnny Mercer, Katie Page, Amanda Raymond, Raynor Shima, Charles R. Young
Pays : Cuba, Argentine, Mexique
Durée : 1h45
Sortie française indéterminée. Sélection FEFFS 2023.

Acteurs Principaux : Efren Ramirez, Greg Grunberg, Sonya Eddy, Demián Salomon, Hemky Madera, Patricia Velasquez, Ari Gallegos, Jacob Vargas, Jonah Ray
Genre : Anthologie horrifique
Note : 7/10
