Réalisation : Agnieszka Holland
Scénario : Andrea Chalupa
Chef Opérateur : Tomasz Naumiuk
Assistant Réalisateur : Jan Mensik
Montage : Michal Czarnecki
Bande Originale : Antoni Lazarkiewicz
Chef Décorateur : Grzegorz Piatkowski
Directrice Artistique : Fiona Gavin
Pays : Pologne, Royaume-Uni, Ukraine
Durée : 1h59
Sortie en salles le 22 juin 2020.
Sortie DVD/BluRay le 4 novembre 2020

Production : Film Produkcja, Andrea Chalupa, Stanislaw Dziedzic, Klaudia Smieja, Egor Olesov, Angus Lamont
Acteurs Principaux : James Norton, Vanessa Kirby, Peter Saarsgard, Joseph Mawle, Kenneth Cranham, Fenella Woolgar
Genre : Film Historique, Drame
Note : 7,5/10
La réalisatrice polonaise Agnieszka Holland (Europa Europa) s’attaque à un gros morceau de l’histoire de l’URSS avec ce film sur Garreth Jones, jeune journaliste gallois qui, parti interviewer Staline au début des années 30, se retrouva en Ukraine au beau milieu de la grande famine connue sous le nom de Holodomor. A l’époque de la Grande Dépression et de la montée du nazisme, le modèle Soviétique connaissait un regain d’intérêt de la part des habitants des pays capitalistes. Beaucoup voyaient dans l’URSS une puissance capable de construire l’alternative, d’autant plus que l’économie locale semblait prospère. Derrière cette providence se cachait un détournement des ressources alimentaires de l’Ukraine et la famine qui mena à la mort de plusieurs millions d’ukrainiens. La dissimulation de cette imperfection du modèle soviétique s’opérait par un strict contrôle de l’information par le Parti qui confinait les journalistes à Moscou, n’hésitait pas à supprimer des correspondants internationaux pour que les horreurs ne fuitent pas ou bien distribuer les offices à ceux qui acceptaient de collaborer. Les dangers de l’extérieur aidant, ceux-ci avaient aussi l’illusion de défendre un moindre mal qui révolutionnerait le monde à terme. Un état d’esprit que décrit très bien « Dans l’ombre de Staline », film dénonciateur qui choisit sans équivoque le camp de Gareth Jones et de ceux pour qui la fin ne justifie pas les moyens.
C’est dans une parfaite reconstitution du Moscou de l’époque que la réalisatrice déroule les découvertes et la prise de position du journaliste. La très belle photographie et une réalisation faussement académique peuplée de quelques envolées sensorielles nous happe dans le feu de l’époque, si l’enthousiasme communicatif de James Norton, parfait dans son rôle, ne l’a pas déjà fait. Mais la plus belle trouvaille du film est sans doute ces extraits de la ferme des animaux de Georges Orwell pour ponctuer le film. Il ne fait aucun doute que l’article de Gareth Jones a inspiré l’écrivain, pour qui l’Holodomor était une belle illustration de l’hypocrisie du communisme stalinien. Le parallèle avec les cochons (les notables de l’URSS) et les hommes (les capitalistes) de la fable est ici flagrant. Nous voyons encore dans ce film un Eric Blair/George Orwell idéaliste que son expérience en Catalogne n’a pas encore dégoutté du communisme. Si le plaidoyer en faveur d’un journalisme de vérité face à la fausseté des institutions est parfois un peu trop lyrique, il a le mérite de pointer du doigt l’allégeance des puissances extérieures envers ceux qui détiennent le plus grand pouvoir et la plus grande richesse, quelles que soient leurs dérives idéologiques et la nécessité d’une plus grande vigilance envers les faux sauveurs dans les périodes les plus sombres. Une situation qui a encore des échos aujourd’hui. Et plus prosaïquement de nous rappeler que des films comme celui-ci qui allient un fond aussi travaillé et une forme aussi agréable nous avaient bien manqué lors de cette période de confinement. Les plateformes ont encore à faire.
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