Réalisation : Mani Ratnam
Scénario : Mani Ratnam, Elango Kumaravel & B.Jeyamohan d’après le roman Ponniyin Selvan de Kalki Krishnamurthy
Directeur de la photographie : Ravi Varman
Montage : A. Streekar Prasad
Musique : A.R. Rahman
Chef Décorateur : Thotta Tharani
Direction Artistique : Thotta Tharani
Production : Zaid Ali, Zohaib Ali, Siva Ananth, John Milton Branton, Rhea Kongara, Bejoy Nambiar, Mani Ratnam, Barani Sakthivel, Aasheesha Srinivasan, A. Subaskaran, Suhasini
Durée : 2h47
Pays : Inde (langue tamil)
Sortie en salles le 30 septembre 2022

Genre : Historique, Action, Drame, Aventures
Note : 7,5/10
La sortie hexagonale de Ponniyin Selvan: I est une bonne excuse pour rappeler que l’Inde est le premier pays en terme de production de films, bien devant les Etats-Unis. Pourtant la sortie des plus gros blockbusters indiens reste cantonnée à une poignée de cinémas parisiens et soutenue presque intégralement par la communauté indienne locale – complètement acquise à la cause de son cinéma et à ses stars, dont le statut n’a pas (ou plus) d’égal aux Etats-Unis ou en Europe. La réaction du public à l’apparition d’une de ses stars, et plus largement lors des projections montre un enthousiasme qui fait plaisir, particulièrement dans notre contexte de désertion des salles et qui prouve à quel point les industries cinématographiques indiennes sont autosuffisantes (Le cinéma indien, ce n’est pas seulement Bollywood, il y’a autant d’industries cinématographiques que de langues et de régions). Cela n’empêche pas l’auteur de ces lignes de conseiller de faire un tour dans une de ces salles parisiennes pour profiter de l’expérience. Du très côté RRR au Snydérien KGF, l’action ne manque pas, et il y’a également de quoi contenter les cinéphiles plus portés sur la comédie.
Tourné en langue tamoul au sud de l’Inde, Ponniyin Selvan: I est un fier représentant de Kollywood, deuxième industrie cinématographique du pays, mais c’est surtout un projet de longue date qui adapte un grand classique de la littérature indienne publié en 1955. A mi-chemin entre le récit historique et le film d’aventures, Ponnyin Slevan dramatise les évènements ayant eu lieu avant l’accession au pouvoir de Arulmozhi Varman, le futur empereur de la dynastie des Chola Rajaraja I, au milieu du dixième siècle. La dynastie des Chola est prospère sous le règne de l’empereur Sundara Chozhar, alors que ces deux fils Aditha et Arulmozhi continuent de conquérir des provinces. Inquiet de ce qui se passe autour de son père, Aditha envoie son ami – l’intrépide Vallavaraiyan – en reconnaissance à la cité de l’empereur. Ce dernier découvre vite une conspiration de l’entourage immédiat de l’empereur pour empêcher Aditha d’accéder au trône à la mort de son père. L’implication dans la conspiration de Nandini, grand amour d’Aditha, et l’intervention de la fille de l’empereur rendent la mission de Vallavaraiyan encore plus périlleuse. Il va devoir, avec l’aide d’un sidekick inattendu, prendre contact avec Arulmozhi/Ponnyin Slevan et le ramener à la forteresse de l’empereur.
Ponniyin Selvan comporte de nombreux personnages et ne s’embarrasse pas d’une longue exposition avant d’entrer dans le vif de son sujet. Il faudra donc un peu ramer avant de raccrocher les wagons, mais l’effort est compensé par un scénario intelligent qui assume ses partis pris. Alors qu’il aurait pu réaliser un film académique, Mani Ratnam assume d’être dans le registre du divertissement complet – ce qui paraît être le meilleur des choix pour adapter un ouvrage qui prend lui même de grandes libertés avec l’Histoire. Les scènes de guerre, de danse, et le ton plutôt humoristique permettent d’entrer aussitôt dans le film, même si on ne saisit pas immédiatement tous ses enjeux. La mise en avant de Vallavaraiyan – qui acquiert vite la sympathie du public – permet de le poster comme l’élément pivot, équivalent d’un détective de roman noir qu’on aurait affublé d’un acolyte. Chaque personnage se dévoile à mesure de ses rencontres, jusqu’à ce que la familiarisation soit suffisamment complète pour que nous puissions développer les relations entre ces personnages un peu plus en profondeur.
Cette première partie bénéficie également d’une galerie d’acteurs charismatiques qui tirent chacun la couverture vers eux. On y retrouvera notamment la ravissante Aishwarya Lekshmi, qui fut découverte par le grand public avec Devdas. Le rythme peut être moins constant lors des passages sur les intrigues de cour dans la forteresse de l’empereur, certains passages se complaire dans les stéréotypes, mais l’impression générale est d’assister à un film d’aventures plaisant et bien ficelé, qui comporte son lot de scènes remarquables – taillées spécifiquement pour le cinéma. Le climax du combat sur la navire est à ce titre aussi bien amené qu’haletant dans son déroulement et son découpage. La diversité des décors, la multitude de figurants et l’ampleur de la réalisation – relevons qu’elle n’est jamais tape à l’oeil, contrairement à d’autres blockbuster indiens – étonnent pour un budget aussi faible. Le film aurait coûté l’équivalent de 60 millions d’euros (5 milliards de roupies)…partagés entre ses deux parties. Après 2h40, lorsque les dernières images annoncent avec fanfare le deuxième volet pour 2023, on peine à se dire que ce n’est pas juste un entracte. Nous répondrons donc présents l’an prochain pour voir la suite des aventures de Vallavaraiyan et de son prince sauvé des eaux.