Fumer fait tousser

Cette année 2022 a explosé le record du nombre de films français simultanément à l’affiche. Le constat est que permettre à plus de films français de sortir en salles n’a pas permis de diversifier l’offre. Les mêmes formules sont régulièrement appliquées avec les mêmes acteurs. La venue d’un nouveau Quentin Dupieux moins de six mois après Incroyable mais vrai est une belle occasion de le rappeler, car le réalisateur est une des rares exceptions à la règle. Un des rares qui n’essaie pas de prouver quelque chose en faisant un film, ni de mettre en avant un discours digéré, mais plutôt d’expérimenter en prenant un plaisir communicatif. Sa montée en puissance en France après le succès de Au poste ! a de quoi interpeller, même si on peut l’attribuer à la présence dans ses films de plus en plus d’acteurs français qu’on voit partout. C’est une belle ironie pour celui qui disait il y’a quelques années préférer tourner avec des seconds couteaux américains plutôt qu’avec des acteurs hexagonaux, qu’il considérait comme peu supportable. Ou bien a t’il su prendre suffisamment de bouteille pour pouvoir les diriger comme il voulait. Un peu comme les frères Coen ont su s’approprier la A-List américaine pour la modeler selon leur humour. L’homme orchestre ajoute cette fois Gilles Lellouche et Vincent Lacoste à sa palette. Fumer fait tousser peut avoir l’air de ne rien raconter. Il brille dans sa façon de le faire, par son art de diriger au meilleur de leur potentiel des acteurs qui évoluent dans un récit nébuleux. Des films que Dupieux a réalisés depuis son retour en France, c’est probablement celui qui héberge les meilleures répliques et dont le timing comique est le plus percutant. Le film tire d’autant plus sa comédie de l’absurde vers le haut que tous les acteurs qui y participent sont confondants de naturel et d’un sérieux à tout épreuve. Ce décalage porte très haut la stupidité de ses personnages, sans avoir à forcer le trait. L’univers référentiel et l’inventivité font le reste du travail.

Fumer fait tousser est un délire Dupieuxien modeste et efficace : un récit à tiroirs non-sensique mais cohérent qui qui nous amène toujours dans des directions inattendues. Il parle souvent de réflexion tout en ne se voulant pas lui même objet réflexif (toute tentative sera désamorcée la minute suivante). Il se vautre dans le potache, mais lâche de belles vérités sur notre monde. Le prétexte est ici d’amener au vert des super-héros de pacotille qui tuent (très) violemment leurs ennemis avec les substances chimiques qui composent le tabac (chacun d’entre eux représente une substance). Ils devront s’isoler quelque jours pour travailler leur camaraderie. Le reste du film sera à découvrir, et s’il est principalement constitué d’échanges entre des personnages (et non d’action), il réserve tout sauf de l’ennui. Tout aussi court que Mandibules ou Incroyable mais Vrai, il sera parfait pour ponctuer une soirée entre potes et alimenter des discussions durables.

Réalisation : Quentin Dupieux

Scénario : Quentin Dupieux

Directeur de la Photographie : Quentin Dupieux

Montage : Quentin Dupieux

Son : Guillaume Le Braz, Alexis Place, Gadou Naudin, Jean-Paul Hurier

Assitante réalisatrice : Alexandra Denni

Cheffe Décoratrice : Joan Le Boru

Directrice Artistique : Joan Le Boru

Effets Spéciaux : Gustav Hoegen

Casting : Marine Albert

Production : Hugo Sélignac, Nicolas Dumont, Antoine Lafon, Arnaud Tournaire

Pays : France

Durée : 1h20

Sortie en salles le 30 novembre 2022

Acteurs Principaux : Gilles Lellouche, Vincent Lacoste, Anaïs Desmoutiers, Jean-Pascal Zadi, Oulaya Amamra, David Marsais, Adele Exarchopoulos, Gregoire Ludig, Doria Tillier, Blanche Gardin, Jérôme Niel, Alain Chabat, Benoît Poelvoorde

Genre : Coméide, Absurde

Note : 7,5/10