Réalisation : John Sayles
Scénario : John Sayles
Directeur de la photographie : Roger Deakins
Montage : John Sayles
Musique : Mason Daring
Chefs décorateurs : Dan Bishop, Dianna Freas
Production : Sarah Green, Maggie Renzi, John Sloss
Pays : USA
Durée : 2h15
Sortie en salles le 7 juillet 1993. Aux USA le 11 décembre 1992

Acteurs Principaux : Mary McDonnell, Alfre Woodard, David Strathairn, Vondie Curtis-Hall, Angela Bassett, William Mahoney, Lenore Banks, Michael Mantell, Maggie Renzi, Shauntissa Willis, Michael Laskin
Genre : Drame
Note : 7/10
Après trois films d’ampleur qui multipliaient les personnages (Matewan, 8 Men Out et City of Hope) , le huitième film de John Sayles le ramène à une échelle plus modeste et un terrain plus intime. Il inaugure aussi pour lui et pour sa productrice Maggie Renzi, une décennie de voyages qui les amèneront notamment au Texas, en Alaska, en Irlande et au Mexique. Cette première étape nous pose en Louisiane, aux côtés de May Alice, actrice de soap opera qui se réveille dans un hôpital en découvrant qu’elle est paraplégique. Elle décide de se retirer dans la maison de sa famille, peu adaptée à une personne dans son état. Refusant son handicap, elle mène la vie dure aux infirmières à domicile qui se succèdent jusqu’à l’arrivée de Chantelle, une infirmière afro-américaine venant de Chicago, aussi secrète qu’intransigeante. Une cohabitation difficile s’amorce, mais peu à peu, ces deux femmes de la ville finiront par se rapprocher et par donner un nouveau sens à leur vie dans l’atmosphère moite du bayou.
Passion Fish est un film de « retour aux sources », de « nouveau cap », dont le centre de gravité est la talentueuse Mary McDonnell. L’actrice, que John Sayles a déjà dirigé dans Matewan, apporte à son rôle un maniement du sarcasme désespéré et un maturité -assez caractéristique des rôles qu’elle tiendra dans sa carrière- qui tranche face à la naïveté des habitants de ce coin reculé. Elle possède un charisme et une assurance aptes à la fois de nous faire ressentir ce qu’est être dans la peau d’une handicapée, sans faire oublier qu’elle était auparavant une femme forte, parfaitement en contrôle de sa vie. Le scénario de John Sayles – pour qui la vocation d’une histoire est toujours de permettre de vivre l’expérience de quelqu’un d’autre – veille à ce que le contrepoids de Chantelle fonctionne un peu comme un garde fou, un miroir qui renvoie à May Alice qui elle est réellement pour l’empêcher de se laisser complètement aller.
Les expériences désastreuses de l’infirmière ont aussi bien forgé son caractère et, à mesure que le respect s’installe entre les deux femmes, Chantelle se libère devant May Alice, et sa vie se dévoile au spectateur. L’interprétation nuancée d’Alfre Woodard permet de toujours rester aux côtés du personnage, qu’elle représente l’infirmière, la femme blessée ou la mère repentie. Mais il y’a un autre protagoniste, la Louisiane, qui occupe une très grande place dans Passion Fish, avec ses lacs, ses bêtes, ses familles trèèèès nombreuses, ses fêtes locales et une atmosphère unique qui représente un dépaysement certain. Roger Deakins, futur chef opérateur des frères Coen fait bien ressortir les spécificités de la région. John Sayles délègue à David Strathairn la fonction de guide pour une séquence qui donnerait envie de se perdre dans le bayou. La convergence de l’histoire des deux femmes et de ce décor donne à la dernière scène, très simple, une portée suffisante pour conclure, faisant de Passion Fish la description modeste d’un chapitre décisif de leurs deux vies, loin d’être la conclusion de leur histoire.